Rencontre avec l’historien de Las Terrenas

Entretien avec Las-terrenas Live

Pierre FAYET est né en 1940 à Montauban, par erreur comme il dit car il se reconnaît plutôt parisien dans l’âme.Rencontre avec l’Historien de Las Terrenas, la Mémoire du village et l’Expert qui vous guidera dans les mangroves du Parc de Los Haïtises.

LTL:Bonjour Pierre. Alors racontez-nous, qu’avez-vous fait de vos 20 ans ?

Pierre FAYET:Après 3 ans de Service Militaire, j’ai démarré comme Cadre dans une Société, et ce pendant une dizaine d’années. Puis j’en ai eu assez et j’ai lâché la cravate pour le Club Med. Cela m’a permis de voyager et travailler un peu partout sur la planète.

LTL:Un peu partout jusqu’à arriver en République Dominicaine ?

Pierre FAYET:Oui je suis arrivé en 1980 pour travailler au Club Med de Punta Cana pendant deux ans. Au terme de ces deux ans, cela faisait dix ans que je travaillais pour le Club Med et j’ai eu l’opportunité de prendre un poste de Directeur d’hôtel dans les Grenadines pendant deux ans. En rentrant en France, je me suis souvenu de Papi, un ami d’enfance que j’étais allé visiter à Las Terrenas pour quinze jours de vacances. L’idée fait son chemin et en 1985 j’arrivais au village, bien décidé à exercer mon métier : le tourisme.

LTL:À quoi ressemblait Las Terrenas lorsque vous êtes arrivés ?

Pierre FAYET:Pour imaginer un peu, à l’époque il n’y avait que le Tropic Banana soit 20 chambres, pas de piscine, pas de tennis, Casa Niña : le bouge dominicain à 50 pesos la chambre) et Diny, le seul hôtel dominicain. En fait, Las Terrenas se réduisait au Village des Pêcheurs et à la Louisiane (quelques baraques en bord de plage, sur 100 mètres, pour ceux qui ne connaissent pas).
Il n’y avait pas de route bitumée, que des pistes en terre. Pas de luz y fuerza (l’EDF locale), pas de téléphone, justes des lampes à pétrole et des générateurs.
C’est grâce à Monsieur DARTOUT, un français et l’appui d’un dominicain : el Señor ORSINI-BOSCH (neveu de Juan BOSCH), que l’électricité a été installée à Las Terrenas en 1994. La fée électricité eu l’effet d’une bombe dans le village reculé, loin des progrès technologiques et accéléra son développement de façon fulgurante.

En même temps qu’il repense à ces années, les visages reviennent également et Pierre a une pensée émue pour tous ses amis disparus au cours de ces 20 dernières années.
Pierre, qui a toujours aimé écrire, est à l’origine du premier petit guide de Las Terrenas. Mais c’est en 1998 que son talent d’écrivain va passer sous les yeux de milliers de lecteurs.

LTL:Pierre, comment devient-on rédacteur du Guide du Routard en République Dominicaine, surtout quand celui-ci n’existe pas ?

Pierre FAYET:En effet, l’Édition sur la République Dominicaine n’existait pas encore. C’est pourquoi cette année là j’ai fait la démarche à mes frais de retourner à Paris pour rencontrer le PDG du Guide du Routard, accompagné d’une étude de budget

LTL:La suite… ?

Pierre FAYET:En 1999 sort la 1ère Édition. Sur 150 pages de République Dominicaine, j’ai réussi à en placer 30 sur la Péninsule de Samana…

LTL:Quel est l’impact du Guide du Routard ?

Pierre FAYET:Les conséquences sont immédiates et les premiers touristes « lecteurs » arrivent en 2000. Même encore aujourd’hui, 80% de mon chiffre d’affaire des excursions des Cascades de Limon et du Parc de Los Haïtises est réalisé grâce au Guide du Routard. Il faut savoir que le Guide du Routard est essentiel pour le voyageur. Je me souviens en 98, après un passage au Brésil, je suis allé au Pérou où j’ai été braqué par des voleurs. Je me suis retrouvé sans le Guide qui était dans le sac volé, ce qui a eu pour conséquence mon départ du pays par manque de ce support et de ses informations.
À Las Terrenas c’est un peu différent car il y a beaucoup de français, c’est rassurant. Tellement, que certains français qui viennent s’installer un an ou deux ici, ne passent pas la barrière de la langue espagnole…

LTL:Parlez-nous du Parc de Los Haïtises et de l’excursion dont vous êtes le guide expérimenté

Pierre FAYET:Le Parc s’étend sur plus de 200 Km2. Il héberge une faune propre aux marécages des côtes Caraïbes : frégates magnifiques, albatros, pélicans, vautours, mouettes, colibris, perroquets, lamantins, tortues et rongeurs. Également une flore intéressante à observer : forêts de palétuviers, tunnels de verdure, mangrove rouge et plantes médicinales, ainsi que de très belles falaises en roche corallienne qui émergent au milieu de la baie. Le paysage rappelle parfois celui de la baie d’Along (au Vietnam), toutes proportions gardées, bien sûr. Nous naviguons au milieu des îlots rappelant (en plus petit) les fameux mogotes de la baie de Phang Na (en Thaïlande), dans les mangroves aussi, au milieu des palétuviers, ces « arbres-racines », pittoresques forêts d’entrelacs qui, selon les indiens d’autrefois, les protégeaient des ouragans. Enfin, on met pied à terre de temps à autre pour visiter des grottes. Pour info, c’est depuis cette gigantesque baie fermée (du côté de Samaná) que Christophe Colomb quitta l’Amérique.

LTL:Que peut-on découvrir d’autre ?

Pierre FAYET:L’une des attractions du Parc justement, ce sont les grottes, habitées il y a environ 1000 ans par les Amérindiens, qui y ont laissé des dessins rupestres (pictographes) et de très belles gravures (pétroglyphes). La Cueva Arena est l’une des plus connues. On y accède par une charmante petite plage où se trouvent la maison des gardiens et quelques tables de pique-nique. De là, un un petit chemin de sable mène à la grotte. À l’entrée, d’étonnantes têtes sculptées, dont une en très bon état. À l’intérieur, 3 petites salles habitées par des chauves-souris. Plus loin (il faut reprendre le bateau), perdu dans la forêt, la vaste Cueva de la Linea, célèbre pour ses centaines de dessins, représentant des hérons, baleines, chauves-souris, enfants, bateaux à voile (figurant, paraît-il, l’arrivée des Espagnols !), personnages rigolos, etc.

LTL:Quelle était la technique utilisée pour peindre ces dessins ?

Pierre FAYET:Les indiens utilisaient un mélange de carbone, de jus de fruits et de graisse de Lamentin, ce qui explique l’excellent état de conservation de ces dessins et nous donne des explications sur leur vie.

LTL:Combien de temps dure la promenade ?

Pierre FAYET:Nous terminons par le Cayo de los Pajaros (l’île aux oiseaux) qui fait le régal des photographes, quand on sait que plus de 100 espèces différentes d’oiseaux vivent dans le Parc. Comptez 5 heures environ. Nous partons de Sánchez vers 9h30 pour être de retour vers 15h-15h30.

LTL:Merci Pierre pour toutes ces anecdotes et histoires de Las Terrenas. Je reviendrai vous voir pour un « Spécial Las Terrenas » dans quelques semaines car je ne pourrai pas tout entrer sur deux pages ce mois-ci…

Si vous voulez découvrir l’autre face du Parc de Los Haïtises, ce spécialiste qu’est Pierre FAYET, installé ici depuis 20 ans, organise l’excursion une fois par semaine, en général le vendredi (à vérifier avec lui).

Il emmène (aujourd'hui son succésseur Nicolas de Flora Tours), sur réservation, des petits groupes francophones. Auteur d’un petit livre à ce sujet, c’est un véritable passionné. C’est dans cette zone inviolée où peu de personnes ont pénétré, que les derniers indiens Taïnos sont morts au début XVIe siècle.

Les amateurs de cette aventure humaine ne seront pas déçus par le côté historique et géopolitique des explications données. Il vous racontera les Taïnos, vous montrera leurs traces, vous traduira leur art et s’il vous reste du temps.

 

 

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